Adaptation de Spike Jonze (mardi 4 octobre 2016, 20h30)

Après Dans la peau de John Malkovich, Spike Jonze retrouve le scénariste Charlie Kaufman pour un film basé sur la vie de celui-ci dans lequel le spectateur a bien du mal à démêler le vrai du faux.

Comme d’habitude, l’entrée coûte 4 euros, 3 pour les membres du COF et vous avez la possibilité d’acheter des cartes de 10 places pour respectivement 30 et 20 euros.

Proposition d’analyse

« I really thought I was ending my career by turning that in. »

C’est ce que Charlie Kaufman déclare peu de temps après la sortie d’Adaptation. Ce film tient en effet tout du pari : tandis qu’on lui avait commandé l’écriture d’une adaptation du livre à succès Le Voleur d’orchidées, Kaufman, n’arrivant pas à un scénario satisfaisant et en manque d’inspiration, accouche d’un egotrip prenant des dimensions gargantuesques. S’y entremêlent les histoires de John Laroche, braconnier d’orchidées en Floride, Susan Orlean, journaliste au New Yorker écrivant le livre Le Voleur d’orchidées sur ce dernier, et Charlie Kaufman lui-même, scénariste devant adapter son livre.

Adaptation constitue la deuxième collaboration du scénariste avec Spike Jonze, après Dans la peau de John Malkovich. On y retrouve déjà les caractéristiques du cinéma de Kaufman  : un certain penchant pour l’introspection qui peut se traduire très littéralement par des voyages « à l’intérieur » des personnages (aspect que l’on retrouvera aussi dans Eternal sunshine of the spotless mind de Michel Gondry et dans Synecdoche, New York de Kaufman lui-même), un goût pour les artistes solitaires, que ce soit un marionnettiste, un scénariste ou un dramaturge, devant faire face à des problèmes d’ordre sentimentaux et professionnels.

Ici, c’est Nicolas Cage, grossi et dégarni, qui campe un Charlie Kaufman caricaturé à l’extrême : loser quarantenaire se masturbant frénétiquement en pensant à une serveuse qui lui a souri plus tôt dans la journée, incapable d’écrire un film « simplement sur des fleurs » de peur de se compromettre en cédant aux diktats hollywoodiens. Le personnage de Donald Kaufman, frère jumeau de Charlie, est inventé pour l’occasion et joue le rôle de contre-poids de Charlie : là où ce dernier est en pleine panne créative, Donald, imbécile heureux, se met à rédiger un scénario après avoir assister à un séminaire de Robert McKee, célèbre professeur d’écriture créative.

Ce serait une erreur de limiter Adaptation à un pur jeu égocentrique de mise en abyme. Kaufman profite des errements de son personnage pour traiter avec une certaine justesse de la difficulté de créer une œuvre nouvelle et originale, qui reste grand public sans tomber dans les facilités d’écriture de certains blockbusters hollywoodiens. C’est sans doute la bonne dose d’autodérision présente tout le long du récit qui fait pardonner à Kaufman son nombrilisme : Jonze et Kaufmann prennent un malin plaisir à faire référence à leur propre film, notamment à travers le personnage de Robert McKee qui donne en aparté à Charlie Kaufman son secret pour réussir un film, et dont la formule résume assez bien Adaptation  : « You can have flaws, problems… but wow them in the end, and you have a hit. »

Vincent